Janvier 2024,
Prof d’histoire-géo à la ville, Morgan Audic est aussi auteur de thrillers. Il imagine des crimes barbares commis dans des contextes géopolitiques troubles et troublés. J’avais apprécié son précédent ouvrage, De bonnes raisons de mourir, dont l’essentiel de l’intrigue prenait place, pendant la guerre du Donbass, dans la zone irradiée de Tchernobyl, retournée à l’état sauvage après l’explosion de la centrale.
Son dernier roman, Personne ne meurt à Longyearbyen, m’a embarqué en plein hiver pour le Svalbard, un archipel norvégien, situé bien au-delà du cercle arctique. L’été, on peut y apercevoir le fameux Spitzberg ; l’hiver, on ne peut espérer contempler que des aurores boréales. Le territoire bénéficie d’un statut diplomatique spécial, car il est tenu pour stratégique par plusieurs pays, et tout particulièrement par la Russie. On y trouve des centres de recherche d’avant-garde en biologie marine. Les conditions climatiques, la configuration désertique et la présence d’ours blancs représentent de telles difficultés dans la vie courante, que les autorités locales sont très attentives à la sécurité et au bien-être de chacun. Tout est fait pour qu’on ne meure pas au Svalbard.
Et pourtant l’on y découvre le corps d’une jeune femme à moitié dévorée par un ours blanc ; une thésarde, qui étudiait l’impact de l’activité humaine sur le comportement des mammifères marins. Accident ? C’est ce que voudraient croire les autorités et la petite équipe de police locale. Dans un thriller, c’est toutefois peu probable. Ce n’est pas non plus l’avis d’une jeune inspectrice récemment installée à Longyearbyen pour se ressourcer, loin de la trépidation stressante des grandes villes.
Une deuxième intrigue se développe dans un autre archipel, plus au sud, à proximité des côtes norvégiennes. Les îles Lofoten ont longtemps vécu de la pêche. Puis le tourisme a pris de l’ampleur, dopé par les superbes paysages de fjords et de reliefs rocheux, ainsi que par la curiosité pour les évolutions des baleines, des bélugas et des orques. Une ex-journaliste de guerre vient de s’y installer, en vue d’une reconversion dans le tourisme marin.
Elle est retrouvée morte, noyée. On pense qu’elle s’est jetée à l’eau. Dépression ou quelque chose comme ça. Bien sûr, un journaliste, ancien partenaire de la victime, n’en croit rien et il investigue.
Deux enquêtes, donc. Convergeront-elles ?
Dans ces régions du Nord profond, on imagine aisément des tempéraments humains sages, réglo, respectueux. Il n’en est rien. Les pêcheurs de saumons, de cabillauds, de baleines n’en font qu’à leur tête. Ils pestent et se rebellent contre les règlements européens et contre les défenseurs de la cause animale. Ceux-ci surveillent ceux-là et n’hésitent pas à dénoncer les nombreuses transgressions. De menaces en provocations, tout peut survenir.
Sans compter que dans certaines bases militaires, on a appris à dresser des cétacés à des fins de reconnaissance sous-marine.
Ce thriller très documenté m’a passionné pendant 45 chapitres (sur un total de 53). J’ai suivi avec plaisir et curiosité les pérégrinations de la policière et du journaliste, deux personnes abimées par la vie, qui enquêtent avec détermination, parcourant sans relâche des territoires nocturnes, glacés et sauvages, pour interroger les suspects. Au bout du compte, on trouve au Svalbard des êtres humains ni meilleurs ni pires qu’ailleurs, qu’ils agissent par intérêt personnel ou pour le compte d’une grande puissance.
Les huit derniers chapitres m’ont un peu déplu. Non pas sur le fond ! Je regrette une espèce de naïveté dans la narration, tant pour les scènes de lutte préalable à l’arrestation du criminel, que pour les trop longues révélations apportées ultérieurement. Mais cela n’efface pas ma bonne impression générale.
GLOBALEMENT SIMPLE oooo J’AI AIME BEAUCOUP