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ça va mieux en l'écrivant !...

... ENCORE FAUT-IL LE LIRE AVANT !

Qui se souviendra de Phily-Jo ?, de Marcus Malte

Publié le 22 Novembre 2022 par Alain Schmoll in Littérature, critique littéraire, lecture, romans

Novembre 2022,

Ce roman, Qui se souviendra de Phily-Jo ?, m’a procuré des sensations incroyables, restées imprimées dans ma mémoire, à peine atténuées par un dernier chapitre qui m’a moins plu. J’y reviendrai.

Je ne sais pas comment se présente le livre broché, s’il dispose d’une table des matières. Dans la version de ma liseuse Kindle, il n’y a pas d’indication sur le plan de l’ouvrage. Etait-ce une volonté de l’auteur ou s’agit-il d’un loupé dans l’adaptation numérique ? Toujours est-il que je me suis lancé à l’aveugle dans les presque six cents pages du livre : une expérience extraordinaire !

Tout commence à Dallas, Texas, par la mort tragique de Philippe-Joseph Deloncle, Phily-Jo pour les intimes, P.J. pour les plus pressés. Accident, suicide ou meurtre ? Il se trouve que P.J. était le concepteur d’une théorie sur la présence d’énergie dans le vide, une révolution copernicienne selon lui, une mystification pour des observateurs accrochés à des intérêts inconciliables. Phily-Jo était aussi le constructeur d’une machine expérimentale, la FreePow, supposée démontrer le sérieux de sa théorie : un appareil capable de fabriquer de l’électricité à partir de l’énergie du vide, une matière première libre et gratuite. De quoi faire frémir les grands fournisseurs d’énergie fossile !

Exit Phily-Jo, donc ! Mais où est passée sa machine ? Le narrateur, Gary Sanz, un professeur de littérature qui taquine la muse à ses heures perdues, mène des investigations troubles et troublantes, en compagnie de sa femme, la belle Michelle, laquelle n’est autre que la sœur de Phily-Jo.

Les aventures que raconte Gary sont passionnantes et leur lecture est jubilatoire. L’auteur multiplie les clins d’œil. Le texte est écrit comme s’il était la traduction française d’un roman américain ; l’idée n’est pas nouvelle, Boris Vian s’y était déjà frotté, ce qui ne gâche ni le mérite de Marcus Malte, l’auteur, ni le plaisir du lecteur. La narration est émaillée de commentaires incidents, posés entre parenthèses, empreints d’humour et d’autodérision. L’auteur nous balade dans des digressions inattendues, longues, passionnantes. Tout cela forme un bavardage truculent et fascinant, dans lequel on est un peu perdu au début. Mais le charme opère et l’on y prend goût.

Soudain, surprise ! Sans signe avant-coureur, après deux cents pages et un nouvel événement tragique dans l’entourage familial de Gary, voilà qu’apparaît le titre du deuxième chapitre : Qui se souviendra de Gary Sanz ?. Changement radical de ton ! Sous la plume d’un nouveau narrateur et sur le modèle d’une enquête très sérieuse, il est question de la population carcérale aux Etats-Unis, plus particulièrement de la peine de mort et de ce qu’on appelle le « couloir de la mort ». Que vient faire là ce documentaire pour le moins inattendu ?… Ce n’est qu’une transition très habile. On retrouve Gary… dans un contexte différent. La fiction romanesque est relancée…

On est alors à peine à la moitié du livre et l’on n’en a pas fini avec les questionnements, les surprises et les rebondissements gigognes. Et l’on n’est pas prêt non plus de découvrir avec certitude ce qui est vrai et ce qui ne l’est pas. Complot machiavélique ou délire paranoïaque ? Ne comptez pas sur moi pour vous en dévoiler plus. D’ailleurs, ai-je moi-même forgé ma propre conviction ?

L’auteur présente des arguments scientifiques solides et s’appuie sur des références littéraires bluffantes. Le personnage de Phily-Jo est inspiré du parcours singulier de Nicolas Tesla, un inventeur génial et fantasque auquel notre confort d’aujourd’hui doit beaucoup. L’auteur évoque largement Vladimir Nabokov, un écrivain souvent qualifié d’enchanteur, qui l’a inspiré dans ce roman où alternent réalisme et artifice : de quoi se jouer du lecteur, qui ne sait plus très bien ce qu’il doit croire.

Le dernier chapitre est très subversif. Marcus Malte ne cache pas ses convictions d’extrême gauche. Il passe de la manipulation en littérature à la manipulation en politique. Des « pièces à conviction » prétendent prouver que les esprits sont manipulés par les grandes sociétés américaines du secteur de l’énergie (pétrole, gaz, électricité) et par le capitalisme en général. Un manifeste politique pas très original et qui n’apporte rien au roman. Car finalement, qui essaie de manipuler qui et dans quel sens ?

DIFFICILE     ooooo   J’AI AIME PASSIONNEMENT

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