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ça va mieux en l'écrivant !...

... ENCORE FAUT-IL LE LIRE AVANT !

Ce qu'il nous faut, c'est un mort, d'Hervé Commère

Publié le 27 Janvier 2017 par Alain Schmoll in Littérature

Ce qu'il nous faut, c'est un mortJanvier 2017,

Voilà un excellent roman ! Juste avant de le commencer, j’avoue pourtant avoir hésité un instant, me demandant ce qui m'avait pris d'acheter ce livre dont on parlait peu et dont l'auteur, un presqu’inconnu, un homme qui se veut simple, n’attire pas la lumière. Reconnaître que je n’ai pas regretté ma lecture est trop faible comme expression de repentance. Je déclare que Ce qu’il nous faut, c’est un mort est un roman finement conçu, qui multiplie les genres et qui m’a sincèrement passionné.

Il y a des romans qui commencent par la fin. Là, c’est l’inverse, Hervé Commère commence par poser des jalons bien antérieurs au début de l'intrigue.

Premier jalon, dix-huit ans plus tôt, quelque part en Normandie. Trois copains d’à peine vingt ans, Vincent, Patrick et Maxime, mènent une virée nocturne qui tourne mal. Un secret qui pèsera longtemps sur leur conscience et sur leurs relations. En même temps, à des centaines de kilomètres de là, une très jeune femme vit un drame épouvantable qui la marquera à jamais.

Pour le second jalon, on remonte près d’un siècle en amont, au lendemain de la première guerre mondiale. A Vrainville, petit village de Normandie, un jeune entrepreneur visionnaire et paternaliste fonde les Ateliers Cybelle, une fabrique de sous-vêtements féminins, dont le développement deviendra un modèle de réussite financière et sociale.

Vrainville, 2016. Aux Ateliers Cybelle, on doute... Un contexte d’un réalisme douloureux auquel nos territoires finissent par être habitués et résignés. Rayonnement de la marque, qualité des articles, engagement du personnel, rien n’y fait. La mondialisation accomplit son œuvre : produire de la lingerie à Vrainville coûte trop cher. Le PDG, un homme jeune, petit-fils du fondateur, voudrait tourner la page. Un fond d'investissement américain se montre intéressé. Mais avec quel avenir pour l’usine locale ? Et comment le village pourrait-il survivre à la disparition de son poumon économique ?

Les habitants sont tous inquiets. A commencer par deux d’entre eux, le Maire et le secrétaire général du comité d’entreprise. Chacun à leur manière, ils tentent de s’opposer aux stratégies du chef d'entreprise. Trois hommes du même âge qui s'affrontent sans tapage, mais avec détermination. Autour d’eux, les femmes, qui constituent l’essentiel des effectifs, s’organisent. L’une d’elle, belle, mais dure, lutte aussi contre des démons... Son passé pourrait-il resurgir ?

Dans des débats qui, dans chaque camp, tournent en rond, quelqu’un prononce ces mots : « Ce qu’il nous faut, c’est un mort »... Une idée qui pourrait faire son chemin.

Effectivement il y a un mort. De critique sociale, le roman tourne à l’énigme policière. À qui profite le crime ? S’en mêle un policier atypique qui finira par tout démêler. Le dénouement final, inattendu, est d’une cohérence subtile.

L’auteur analyse avec finesse les personnages, leur psychologie, leurs pensées, leur comportement. Il les dépeint dans des phrases courtes, simples, précises, un peu naïves ; des verbes conjugués au présent, des mots du langage parlé, dans un rythme légèrement saccadé. Comme un commentaire off qui accompagnerait des portraits captés de près, caméra à l’épaule, les réflexions intimes s’affichant en sous-titre.

Dans une sorte de bienveillance humaniste, Hervé Commère ne juge pas ses principaux personnages. Ou s’il les juge, il ne les loue ni ne les condamne. Ceux qui paraissent les meilleurs ont leur part d’ombre. Les plus retors ne le sont pas sans excuse. La plupart ont fait leur chemin en suivant les rails sur lesquels la vie les a posés. Quelques uns ont eu le courage de choisir un autre chemin. Cela les rend-il meilleurs ? Ou plus heureux ?

A quoi bon, semble se résigner l’auteur ! Qui peut quelque chose à la marche du monde ? « Nous avons vécu sur un trésor qui s’envole... C’est fini, c’est tout... C’est dommage pour nous, c’est très dommage, mais nous n’y pouvons rien », fait-il dire à l’un des protagonistes. Des propos pessimistes qui entrent en résonance avec les observations sur la décadence délivrée récemment par un philosophe dont les territoires ne sont pas si éloignés de Vrainville...

Pour ma part, la lecture de ce livre ne m’a apporté que du plaisir. Ce n’est pas ce qui fait le bonheur, mais cela y contribue.

FACILE ooooo J’AI AIME PASSIONNEMENT

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Z
Une chronique qui me plait beaucoup et un livre à découvrir
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