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ça va mieux en l'écrivant !...

... ENCORE FAUT-IL LE LIRE AVANT !

Le Venin des souvenirs, de Sophie Lebarbier

Publié le 27 Août 2024 par Alain Schmoll in Littérature, chroniques littéraires, lecture, romans

Août 2024, 

Sophie Lebarbier est l’une des deux créatrices/scénaristes de la série télévisée policière Profilage, qui fut programmée sur TF1 pendant une dizaine d’années. Elle s’est mise, il y a deux ans, à l’écriture de romans policiers. Elle y reprend l’idée d’intégrer des psycho-criminologues — ou profilers — dans les équipes d’enquêteurs.

Pour Le Venin des souvenirs, son deuxième roman, elle a conçu un enchevêtrement de destinées individuelles et d’intrigues criminelles extrêmement complexes, s’articulant autour de trois époques.

A Paris, en 2020, Arthur, un jeune journaliste, prévient la police que sa compagne, prénommée Neige, a été victime d’une tentative de meurtre. Furieuse, Neige quitte Arthur sur le champ et prend la fuite. La police enquête sur son lieu de travail, une luxueuse et coûteuse résidence pour personnes très âgées, où sont installées deux femmes nonagénaires prénommées Suzanne et Colette… Une mort violente survient en plein bois de Boulogne…

En 1989, une petite fille de quatre ans, Magali, disparaissait. Enlèvement, accident, meurtre ? On ne sait toujours pas, on n’a jamais retrouvé son corps. Pendant des mois, à l’heure du dîner, la photo de la petite fille est apparue sur les écrans de télé ; les gens se sont passionnés pour l’enquête, jamais résolue… Trente ans plus tard, ils se demandent encore : qu’est-il arrivé à « la petite Magali » ?

Retour en arrière dans les années quarante, pendant l’Occupation, dans un village de Dordogne. Un petit garçon juif, Paul, venait d’être accueilli et hébergé dans une famille locale. Deux très jeunes filles, Suzanne et Colette, allaient devenir ses plus proches amies. Au village, comme partout en France, la population était partagée : certains s’activaient clandestinement dans la Résistance, pendant que d’autres profitaient de la situation. A la Libération, les beaux et les vilains rôles ont changés de mains. Et des années plus tard, on se demande toujours ce qu’est devenu « le trésor des Angliches », un stock de lingots d’or parachutés pour financer la Résistance, qu’on n’a jamais retrouvés.

Pour donner un sens à son roman et relier ces trois épisodes, l’autrice a échafaudé des péripéties incroyables, qui te sont révélées, lectrice, lecteur, au compte-gouttes. En les découvrant au fil des chapitres, tu les jugeras surprenantes, tu penseras que tu n’aurais jamais osé les imaginer, tu trouveras peut-être que certaines sont peu crédibles, mais tu devras reconnaître qu’elles s’assemblent les unes aux autres avec cohérence, comme dans un puzzle.

Je ne sais pas si les puzzles font l’objet d’un classement en fonction de leur difficulté, mais là, tu as droit à la version olympique. D’ailleurs, les toutes dernières pièces ne te seront livrées que dans les pages finales, sous la forme d’une lettre écrite trente-cinq ans plus tôt et oubliée dans un tiroir. Le procédé n’est pas original, mais il n’y avait peut-être pas d’autres moyens pour boucler les tenants et aboutissants de cette fiction aussi ahurissante que captivante.

Les personnages, nombreux, jouent des rôles décisifs dans les péripéties. L’autrice consolide leur influence en s’étendant de façon approfondie sur leur vécu, sur leur psychologie et sur leurs convictions. Ce travail littéraire confère au roman une densité narrative qui compense certaines invraisemblances.

Parmi les personnages, tu t’attacheras, comme moi, au trio pittoresque d’enquêteurs en charge de l’affaire. Au sein de la PJ, il est conduit par une commandante quinquagénaire, dont la féminité abolie s’exprime par un mauvais caractère/bon cœur. Elle est flanquée d’un jeune adjoint rétif au terrain mais imbattable sur le plan juridico-informatique, et d’une psychologue qualifiée et consciencieuse, mais tourmentée et boulimique.

L’écriture est très soignée, la lecture est fluide, agréable. L’autrice s’autorise quelques familiarités de langage bien senties, qui témoignent de son sens de l’humour. L’engagement de certains personnages dans la lutte contre les violences faites aux femmes et en faveur de l’accueil de certaines populations reflète probablement ses convictions. Libre aux romanciers de diffuser les messages de leur choix dans leurs fictions, libre ensuite aux lecteurs d’en apprécier la pertinence littéraire.

DIFFICILE     oooo   J’AI AIME BEAUCOUP

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