Août 2024,
Particulièrement préoccupé par la menace que les cartels de narcotrafiquants font peser sur les démocraties, j’avais trouvé un véritable intérêt dans La Frontière, épisode final d’une trilogie romanesque de Don Winslow consacrée à la lutte, aux Etats-Unis et dans toutes les Amériques, d’un agent fédéral contre ce que l’auteur appelle les narco-empires. J’avais apprécié le travail de documentation, le réalisme implacable des péripéties et la prise de position engagée de l’écrivain.
J’avais pensé retrouver cet esprit dans La Cité sous les cendres, que le célèbre auteur de romans policiers, aujourd’hui septuagénaire, annonce être son ultime ouvrage écrit. Comme c’était le cas pour La Frontière, le livre est le dernier volume d’une trilogie dont je n’ai pas lu les deux premiers, ce que je ne regrette pas.
L’intrigue de cette trilogie s’était engagée à Providence (Rhode Island), une ville qui, dans les années quatre-vingt, était devenue un haut lieu du crime organisé et qui avait fini par s’embraser dans des affrontements sanglants entre mafias irlandaise et italienne ; l’intrigue globale s’achève vingt ans plus tard dans La Cité sous les cendres, à Las Vegas, dans le business borderline des jeux et de l’hôtellerie.
Le personnage central, Danny Ryan, n’est pas un policier. L’auteur l’a dépeint en héros emblématique de roman d’aventures pour adolescents : beau, fort, intelligent, audacieux, bienveillant… Gangster dans sa jeunesse, Danny a fui Providence et ses tueries ; il s’est acheté une conduite, a fait fortune dans le cinéma à Hollywood, avant de s’installer à Las Vegas, où, entrepreneur visionnaire, il ouvre des hôtels de plus en plus extravagants, attractifs et prospères. Un parcours que l’auteur compare à celui d’Enée, fuyant Troie en cendres pour fonder Rome, encombré d’un père très âgé et d’un fils en bas âge… Bon ! Pourquoi pas ?
Difficile d’effacer le passé ! En dépit de ses talents, de sa bonne mentalité et de ses saines résolutions, Danny est pris en tenaille entre la justice, qui n’a pas renoncé à lui chercher des noises pour ses erreurs de jeunesse, et d’anciens partenaires prétendant avoir des comptes à solder. Il lui sera d’autant plus difficile de faire table rase de son passé, que pour se débarrasser des empêcheurs de tourner en rond, rien ne vaudra justement les bonnes vieilles méthodes radicales d’antan, que Danny s’était pourtant promis d’oublier.
Le roman associe plusieurs intrigues ayant probablement eu des liens dans les volumes précédents de la trilogie, mais qui n’en ont plus vraiment dans l’ouvrage final. Longues à se développer, elles ne t’apprendront pas grand-chose, lectrice, lecteur, et elles peineront à te captiver. Pour les raconter, l’auteur a de surcroît opté pour une écriture minimaliste, des phrases très courtes, toutes au présent. Tu auras peut-être, comme moi, l’impression de lire des canevas descriptifs de scénarios.
La narration s’anime quand même à l’approche de la fin et prend des allures de western, avec, pour chaque intrigue, une série de règlements de comptes violents, qui ont le mérite de clarifier les situations. Chacun fait l’objet d’un court chapitre s’achevant en suspens par des coups de feu, sans que sur l’instant, lectrice, lecteur, tu saches qui a perdu et qui a gagné, ou pour être clair, qui a été tué et qui s’en sort bien. Cela te rappellera les films de westerns et leurs duels finaux, où le méchant semble indemne pendant quelques secondes, avant de lâcher son flingue et de s’effondrer dans la poussière.
Des pratiques cinématographiques que Don Winslow adapte avec finesse dans son œuvre écrite. Je m’y suis laissé prendre et cela m’a permis de refermer le livre sur une impression pas trop négative.
GLOBALEMENT SIMPLE oo J’AI AIME… UN PEU