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ça va mieux en l'écrivant !...

... ENCORE FAUT-IL LE LIRE AVANT !

Gatsby le Magnifique, de Francis Scott Fitzgerald

Publié le 12 Mai 2024 par Alain Schmoll in Littérature, critique littéraire, lecture, romans

Mai 2024, 

New York, début des années vingt. Au lendemain de la Grande Guerre, l’économie, l’industrie et la construction ont rapidement retrouvé des couleurs. On s’enrichit et on dépense. On cherche aussi à s’amuser, à s’étourdir dans la fête, on se précipite dans des bars privés ou dans des soirées où la musique de jazz bat son plein, où les boissons alcoolisées coulent à flots… malgré la Prohibition, une loi qui permet aux trafiquants de faire fortune encore plus vite que les autres. Ce sont les roaring twenties, l’équivalent de ce qu’en France on appelle les années folles.

Cette société qu’on qualifierait aujourd’hui de déjantée et de décadente sert de toile de fond en 1924 au jeune Francis Scott Fitzgerald, pour écrire Gatsby le Magnifique, son roman le plus célèbre. Comme d’autres écrivains américains de ce qu’on nommera la « génération perdue », Fitzgerald s’en ira, en compagnie de son épouse Zelda, brûler sa vie par les deux bouts en France, entre Paris et la Côte d’Azur.

Je n’avais jamais lu Gatsby, un roman iconique qui inspira plusieurs films à grand spectacle, avec dans le rôle-titre des stars comme Robert Redford et Leonardo de Caprio. Des films surtout primés pour leurs décors et leurs costumes, ce qui explique peut-être pourquoi, lors de leurs diffusions à la télé, je ne les avais jamais regardés jusqu’au bout.

En le lisant, j’ai découvert que l’ouvrage ne se résume pas à une peinture extatique ou satirique d’un microcosme mondain des roaring twenties. Il s’y développe aussi une intrigue amoureuse. Indécelable au départ, elle prend corps peu à peu, semblant presque anodine, avant que les circonstances, les obsessions d’un protagoniste et le machiavélisme d’un autre ne la transforment en véritable drame.

Tout commence à Long Island, la station balnéaire huppée de New York, dans les soirées grandioses données en son château par un certain Gatsby, un mystérieux jeune homme de belle allure, dont personne ne connaît les origines ni celles de sa fortune. On s’y presse, on s’y amuse, on y rencontre des notables, des vedettes. Il est d’ailleurs de bon ton d’être là, de se montrer, de jouer les habitués. D’un côté du miroir, les profiteurs, les voyeurs, ceux qui voudraient s’assimiler à leur hôte magnifique, compter sur son appui, tout en expurgeant leur jalousie et leurs rancœurs par des ragots proférés derrière son dos.

Mais de l’autre côté du miroir, quelles sont les vraies motivations de cet homme qui dilapide sa fortune en recevant aussi fastueusement son monde ? Est-ce pour que sa magnificence soit prise pour de la munificence ? Est-ce pour séduire quelqu’un ? A-t-il une idée derrière la tête ?

L’auteur s’est glissé dans la peau du narrateur, Nick Carraway, un jeune financier débutant dont la modeste demeure jouxte celle de Gatsby. D’abord spectateur étonné s’abstenant de tout jugement rapide, Nick sera amené malgré lui à jouer un rôle actif dans l’intrigue amoureuse et à assumer une responsabilité indirecte dans son dénouement tragique. Un dénouement dans lequel il soulignera avec amertume l’ingratitude oublieuse des foules et l’insouciance arrogante des plus privilégiés.

Ses observations morales et sociologiques reflètent l’état d’esprit ambigu de Fitzgerald, impressionné par le luxe et l’opulence, accro aux festivités extravagantes et bien arrosées, tout en dissimulant derrière du mépris le regret de ne pas disposer de l’aisance que procure la gloire ou la fortune. Un mal-être caractéristique d’une génération d’artistes, qui ont cherché désespérément à donner un sens à leur destin dans les années troubles de l’entre-deux-guerres.

Carraway / Fitzgerald ne manque pas de souligner que les protagonistes sont tous originaires du Middle West et qu’ils éprouvent inconsciemment une sorte de fascination pour New York, nouveau symbole du rêve américain. Une autre forme du complexe du « provincial », tel que Balzac le décrivait largement quelques décennies plus tôt.

Flamboyant et sophistiqué, le texte français, que j’ai lu avec beaucoup de plaisir, témoigne du talent singulier et très maîtrisé de l’auteur américain, un grand écrivain. L’humour de son ton, subtil et présent de la première à la dernière ligne, reflète encore son affectation un peu condescendante à l’égard de personnages dont l’aisance le subjugue.

GLOBALEMENT SIMPLE     oooo   J’AI AIME BEAUCOUP

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