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ça va mieux en l'écrivant !...

... ENCORE FAUT-IL LE LIRE AVANT !

Le Cercueil de Job, de Lance Weller

Publié le 25 Avril 2022 par Alain Schmoll in Littérature, critique littéraire, lecture, romans

Avril 2022,

Lance Weller, un écrivain américain quinquagénaire s’est fait la spécialité d’explorer la violence sur laquelle s’est fondée, au dix-neuvième siècle, la nation des États-Unis d’Amérique. Une violence dont il met en évidence les dégâts provoqués dans l’esprit des hommes qui l’ont vécue. Qu’ils en aient été acteurs, victimes ou témoins, la plupart n’ont cessé de s’interroger – comme le Job de la Bible – sur leur culpabilité ou leur innocence, sans généralement obtenir de réponse.

Le Cercueil de Job, son troisième roman, met en lumière des personnages fictifs, intégrés dans un récit historique très documenté sur la guerre de Sécession, laquelle opposa entre 1861 et 1865 les nordistes des Etats de l’Union aux sudistes des Etats confédérés, sur le thème ultrasensible de l’abolition de l’esclavage. Une guerre civile qui fut une vraie guerre, très meurtrière ; une sale guerre, attisée par des déchaînements de haine de part et d'autre ; un conflit entre deux choix de société, développement industriel prospère au Nord versus traditions rurales impécunieuses au Sud ; un embrouillamini où des hommes furent mobilisés dans l’un ou l’autre camp sans adhérer aux idées correspondantes, juste au hasard de leur présence dans tel ou tel Etat belligérant.

Le roman s’achève en avril 1864, lors de la prise et du massacre de Fort Pillow, où ont convergé la plupart des personnages. L’auteur a donné les rôles principaux à deux personnes incarnant une espérance et une foi en l’humanité ayant résisté jusqu’au cœur de l’enfer. Ils sont confrontés à des êtres infects, d’un racisme brut qu’on ne peut même pas imaginer de nos jours. Certains comportements sont infâmes : la faim et/ou la vénalité poussent des soldats confédérés à faire les poches de leurs ennemis morts, et incitent des Yankees à faire la chasse à des esclaves en cavale pour les revendre. Mais ils rencontrent aussi des personnes indulgentes et généreuses, des Blancs doutant de leur innocence, des Noirs cherchant à s’affranchir l’esprit de leur passé de soumission.

Bell Hood est une très jeune esclave en fuite. Sa personnalité exprimait tant de confiance, que le contremaître de l’exploitation agricole à qui elle appartenait, agacé, lui avait imprimé des marques au fer rouge sur les joues. Son sourire rayonnait tant, que le contremaître lui avait percé dans une dent un trou en forme d’étoile. Dans sa fuite, Bell suit sa route en guettant dans les cieux le Cercueil de Job, un groupe d’étoiles en losange, un horizon cosmique symbolique qui en vaut bien un autre. 

Joe Hoke, un jeune homme recruté par un bataillon sudiste, est resté handicapé après avoir été blessé et mutilé aux mains lors de la terrible bataille de Shiloh, en 1862. Il se rétablit physiquement et psychologiquement auprès d’un couple de fermiers âgés et bienveillants, puis part sur les chemins, tel un vagabond, vivant de petits boulots, marqué de façon indélébile par la honte que lui avait inspirée autrefois la cruauté épouvantable de son père. Une errance en quête de rédemption.

Bell et Hoke ont été tous deux traumatisés par des circonstances qu’ils ont vécues ensemble. Des faits dont l’auteur laisse le souvenir se profiler graduellement, un peu comme prend forme, dans le film Il était une fois dans l’Ouest, le motif du règlement de comptes entre Charles Bronson et Henry Fonda. Les longues et récurrentes descriptions d’aventuriers louches traînant sous un soleil de plomb et celles de champs de bataille poussiéreux ou boueux jonchés de cadavres m’ont aussi fait penser aux westerns de Sergio Leone. Mais à la lecture, manque la musique d’Ennio Morricone.

Bell Hood a inspiré ces jolis mots à l’auteur : « S’il n’y avait pas eu les marques, son visage aurait été une page dans un livre ouvert presque encore vierge, prête à recueillir toutes les merveilles que le reste de sa vie pourrait y écrire ». Une référence parmi plusieurs autres à l’Alice de Lewis Carroll…

Le Cercueil de Job n’est pas un roman facile à lire, les chapitres ne suivant pas la chronologie. L’insertion de témoignages permet d’y voir plus clair. Et certaines pages sont à couper le souffle, tant la plume de l’auteur exprime avec un réalisme évocateur les ciels nocturnes étoilés, les cours d’eau miroitant sous la lune, mais aussi les bruits lugubres de la forêt, le cynisme de certains individus, le sang giclant des membres mutilés ou les odeurs rebutantes des charniers… Il faut aimer ce genre de descriptions !

DIFFICILE     ooo   J’AI AIME

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