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ça va mieux en l'écrivant !...

... ENCORE FAUT-IL LE LIRE AVANT !

Americanah, de Chimamanda Ngozi Adichie

Publié le 18 Février 2020 par Alain Schmoll in Littérature, critique littéraire, lecture, romans

Février 2020,

Americanah ! C’est le mot grinçant utilisé par les Nigérians restés au pays pour nommer leurs compatriotes partis vivre en Amérique. Une façon d’ironiser sur celles et ceux qui se font un devoir de corriger leur prononciation d’origine pour parler l’anglais comme les Américains.

 

Chimamanda Ngozy Adichie a été une Americanah. Elle est aujourd’hui une auteure majeure de la littérature anglophone contemporaine. Militante féministe et antiraciste, elle est considérée comme une intellectuelle de premier plan aux Etats-Unis, où elle s’était expatriée à l’âge de dix-neuf ans pour suivre des études universitaires. Aujourd’hui quadragénaire, elle partage sa vie entre Washington et Lagos. Nombre de ses ouvrages, romans, essais, poésies ont été récompensés par des prix littéraires.

 

Fort de ses deux cents millions d’habitants, de ses importantes ressources en pétrole et de son économie diversifiée, on pourrait penser que le Nigeria ouvre des perspectives motivantes à ses jeunes, en tout cas à ceux qui ont la chance d’être issus de familles bourgeoises. Mais dans ce pays miné par l’instabilité politique, la corruption à grande échelle, la délinquance financière et des poussées de violence islamique, leur vie quotidienne est gâchée par l’immobilisme, l’incurie et la récurrence de grèves fréquentes.

 

A l’instar d’Ifemulu, personnage principale du roman et véritable double de l’auteure, nombreux sont les étudiants nigérians qui ont rêvé et rêvent encore de s’expatrier en Amérique. Ils y découvrent que l’Amérique n’est pas le pays de cocagne qu’ils avaient imaginé. « Rien de semblable aux jolies rues du Cosby show », constate tristement Ifemelu, lors de son arrivée à Brooklyn, où elle est hébergée par une cousine en échange de services ménagers. Elle n’est pas au bout de ses peines. Les études sont coûteuses et un visa d’étudiant n’autorise pas à travailler. Pour survivre restent les petits boulots clandestins… quand ce n’est pas pire.

 

Americanah est un roman de mœurs, une critique drôle et féroce – mais jamais agressive ! – de la société américaine et de la bourgeoisie nigériane. Le talent de conteuse de l’auteure, son humour, son sens de la formule, la justesse de ses mots – parfaitement rendus par la traductrice – en font une lecture passionnante et jubilatoire tout au long de ses presque sept cents pages.

 

Le roman est aussi l’histoire de l’amour d’Ifemelu et d’Obinze. Ils sont adolescents quand ils se rencontrent. Ils tombent amoureux et sont convaincus qu’ils sont faits l’un pour l’autre. Lorsque Ifemelu décide de partir pour l’Amérique, il est convenu qu’Obinze viendra la rejoindre rapidement. Mais rien ne se passe comme prévu. Ifemelu, en Amérique, vit des jours très difficiles et Obinze ne peut trouver mieux qu’une opportunité d’expatriation au Royaume-Uni, une expérience qui se terminera de façon humiliante pour lui. Toujours est-il que leur relation se dissout…

 

Après bien des difficultés, Ifemelu finit par trouver ses marques en Amérique. Elle devient une blogueuse célèbre, dont les commentaires critiques et sarcastiques d’une Noire non américaine sur la société américaine font fureur. Elle avertit les Noirs qui viennent d’Afrique : c’est en arrivant en Amérique qu’elle avait pris conscience d’être une Noire ! Une façon de dire qu’il n’y a de problème noir qu’en Amérique, héritage d’un passé, mémoire de l’esclavage, séquelle de la ségrégation. Un racisme avéré, que ne fait qu’attester un abus ridicule de formules « politiquement correctes ».

 

Quand quinze ans plus tard, Ifemelu décide de rentrer au Nigeria, elle y revoit Obinze. Il a fait fortune dans l’immobilier, est marié à une très jolie femme et est le père d’une petite fille. Lorsqu’ils se retrouvent, Ifemelu et Obinze constatent que, malgré leur si longue séparation, rien n’a changé entre eux. Comment cette histoire peut-elle se terminer ?

 

Je n’ai rien de commun avec Obinze, encore moins avec Ifemelu. Je ne suis pas nigérian, ni noir, je n’ai jamais vécu en Amérique, je ne me suis jamais demandé si les Noires devaient lisser leurs cheveux ou si elles devaient assumer des coiffures à l’afro ou à tresses, mais tout au long de ma lecture, je me suis trouvé en empathie totale avec ces deux personnages. Un ressenti dû à l’immense talent d’écriture de Chimamanda Ngozi Adichie.

 

DIFFICILE     ooooo   J’AI AIME PASSIONNEMENT

 

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