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ça va mieux en l'écrivant !...

... ENCORE FAUT-IL LE LIRE AVANT !

La promesse de l'aube, de Romain Gary

Publié le 1 Décembre 2017 par Alain Schmoll in Littérature, critique littéraire, romans

Novembre 2017,

J’ai honte de l’avouer mais je n’avais jamais lu de livre de Romain Gary. Signé Romain Gary, j’entends ! Je m’étais intéressé à Emile Ajar, lorsque tout le monde en parlait, vers la fin des années soixante-dix, mais avant « l’affaire » et après les classiques du vingtième siècle, Romain Gary himself s’était retrouvé dans une sorte d’angle mort de mon panorama littéraire.

 

Une honte que je ne me pardonne pas, ayant découvert que Gary a été, à plusieurs reprises, magnifiquement évoqué par un de mes amis d’enfance. Il faut dire que le talent et la légitimité de cet ami à s’exprimer sur l’écrivain se situent à un autre niveau que le mien. Mais peut-être verra-t-il dans mon image personnelle d’angle mort, une illustration de plus au besoin qu’éprouva Gary de se réinventer sous une nouvelle identité.

 

J’ai choisi de lire son livre le plus renommé, La promesse de l’aube. Romain Gary raconte la vie de l’homme qu’il a été et/ou qu’il aurait voulu avoir été, depuis son enfance jusqu’à l’atteinte, à la fin de la guerre, d’un triple objectif symbolique que lui avait assigné sa mère. Dans l’ordre et avec des majuscules : s’être fait Ecrivain, Héros, Diplomate.

 

C’est un roman psychologique, poétique, philosophique, historique et aussi, bien sûr, fondamentalement autobiographique, même si, lorsqu’il rapporte certain événement, l’auteur dépasse ou s’approprie une réalité qui n’est pas forcément celle qu’il a authentiquement vécu. Cela n’ôte rien au romanesque de l’anecdote, à la beauté du texte et au plaisir de le lire.

 

C’est aussi un roman d’amours. L’histoire de l’amour d’une mère pour son fils, qui le ressent avec une telle intensité qu’il ne pourra plus tard qu’être déçu par les femmes. Et c’est l’histoire de l’amour d’un fils pour sa mère, à qui il le doit bien. Car dans ce livre, l’exceptionnel n’est pas l’amour maternel, qui est juste celui que porterait à son fils unique, toute femme restée seule et meurtrie après un abandon. L’exceptionnel, ce ne sont pas non plus les privations touchantes auxquelles cette femme s’astreint – elle m’a rappelé la mère et la grand-mère dans Le premier homme de Camus –. Ce qui est exceptionnel, c’est l’ambition insensée, hallucinatoire, que cette femme aura insufflé à son fils, une ambition qu’il s’appropriera d’instinct, tout au long d’une enfance et d’une jeunesse portées par une espérance d’une force inouïe, entrecoupée toutefois de quelques moments de dépression.

 

La mère sera présente pour toujours dans l’esprit du narrateur, telle un ange-gardien ou une conscience le protégeant du mal et lui interdisant tout renoncement. Est-ce à la chance ou à la force de leur espérance, que Gary – ou son double – aura survécu à plusieurs maladies graves qui semblaient le condamner, ainsi qu’à de multiples accidents dans des missions aériennes fatales à la plupart de ses camarades de la France Libre ?

 

On ne peut nier la satisfaction et la fierté que le narrateur éprouve à se raconter. Nullement exempt de déconvenues ni de mauvaises décisions, il les assume avec franchise et un sens de l’autodérision dont seuls disposent ceux qui ont une très haute opinion d’eux-mêmes… Mais c’est également la caractéristique des personnes qui ne sont pas aussi sûres d’elles qu’elles voudraient le faire croire.

 

L’écriture est subtile, déliée, élégante, tout en restant simple, naturelle. Le ton est foisonnant mais jamais pesant, recherché mais jamais emphatique. Romain Gary dispose d’une facilité étourdissante à composer sur ses rêves, ses souvenirs, ses contemplations. Une inspiration, une verve, un humour, une aptitude à développer une anecdote, un souvenir – réel, imaginé ou emprunté – dans les moindres détails, sans jamais être ridicule ou ennuyeux, trouvant toujours la tournure et les mots justes.

 

Et puis il y a le chapitre final. Bien que n’ayant pas lu le livre, je connaissais l’histoire des dernières lettres. On me l’avait racontée. Je n’ai jamais pu finir de la raconter à mon tour, ma voix se trouvant à chaque fois étranglée par l’émotion. Une émotion qui m’a à nouveau étreint avant de refermer le livre.

 

La promesse de l’aube fait partie de ces livres qu’on lit une fois, puis qu’on peut reprendre à n’importe quel moment, en l’ouvrant à n’importe quel chapitre, pour lire juste un passage, ou quelques pages, comme ça, pour le plaisir. Un apanage dont seuls quelques très grands écrivains peuvent se prévaloir.

 

FACILE     ooooo   J’AI AIME PASSIONNEMENT

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E
Je ne l'ai lu que cette année et je medemande bien pourquoi. Magnifique.
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A
Et maintenant vous pouvez lire Un certain M.Piekielny de François-Henri Désérable!
Répondre
A
Pas sûr !