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ça va mieux en l'écrivant !...

... ENCORE FAUT-IL LE LIRE AVANT !

La succession, de Jean-Paul Dubois

Publié le 28 Septembre 2016 par Alain Schmoll

La succession

Septembre 2016,

Un titre sec –  La succession – pour une histoire qui en dit plus long sur le sujet que je ne l’aurais pensé. Jean-Paul Dubois réserve des surprises à chaque chapitre de ce récit original, très agréable à lire. Son écriture est au début empreinte d’une touche légère d’humour noir. Sur la fin, elle aura tourné à la noirceur grinçante, sans que je me sois vraiment rendu compte du glissement. Du grand art.

Le narrateur est Paul, bientôt trente ans, originaire de Toulouse, docteur en médecine. Il n’a jamais exercé. Il vit à Miami, une ville gaie, animée, ouverte, baignée par l’océan. Il fait beau toute l’année, ou presque. Paul est pelotari professionnel... Nous sommes dans les années quatre-vingt. La pelote basque est très populaire en Floride. Les matches se déroulent à guichet fermé dans des arènes de quinze mille places. On y croise Frank Sinatra, Paul Newman, John Travolta, entre autres stars... C’est un très gros business. On parie des sommes considérables.

Joueur lambda, Paul gagne tout juste de quoi vivre. Mais il est fou de pelote basque depuis l’enfance. La chistera est à la fois sa passion et son métier. Que demander d’autre ? Il est heureux, pleinement heureux. Ce sont les plus belles années de sa vie.

C’est en tout cas ce qu’il déclare dès les premières pages. Son expression est alors enjouée, pleine d’entrain, même si l’on peut y déceler une fêlure. « What’s wrong with you ? » s’interroge régulièrement sa petite amie en l’observant.

En réalité, la pelote basque est pour Paul un exutoire. Il n’a jamais été heureux. La faute à une famille qu’il ne supporte pas, qu’il n’a jamais supportée. Des originaux, égocentriques, vivant chacun sur leur planète. « Incapables de vivre, de supporter leur propre poids sur cette terre, (ils) m’avaient fait, fabriqué, détraqué. » déplore-t-il. C’est pour oublier cette famille – du moins ce qu’il en reste, comme on va le voir ! – qu’il s’est exilé à Miami.

Dressons l’inventaire. Ils étaient quatre. Dans la famille de Paul, j’ai d’abord demandé le grand père : un hurluberlu facétieux ; d’origine russe, il prétendait avoir été le médecin de Staline et racontait moult fariboles. Puis j’ai demandé la mère : l’oncle s’est présenté en même temps ; ils ont vécu collés l’un à l’autre comme mari et femme, ou plutôt comme des jumeaux siamois ne quittant jamais leur bulle. Sinistre point d’orgue de l’extravagance de ces trois-là : ils ont mis fin à leurs jours sans raison apparente ni signe avant-coureur. Paul en raconte les circonstances sur un ton de détachement amusé. Comme si leurs suicides étaient une sorte de pied-de-nez burlesque.

Reste le père, Adrian. Un médecin de famille à qui il arrive de recevoir ses patients en short, parfois même en slip ! Quand il y pense, cela met Paul hors de lui... Adrian donne l’impression d’être plongé dans des considérations symboliques très personnelles. Père et fils ne se sont jamais compris, ne se sont jamais supportés. Le père n’a pas prononcé les mots qu’aurait attendus son fils. Lui n’a pas compris le sens des messages de son père : « Un jour tu finiras par prendre ma succession ! ».

Ça devait arriver. Un jour, Paul apprend la mort de son père... Oui, lui aussi ; comme les autres. Avec une mise en scène bien dans l’esprit du personnage.

Ça change tout pour Paul ! De fils unique, il devient seul survivant, le dernier des .... Il va falloir devenir adulte et, selon la formule consacrée, liquider la succession… Il ne s’agira pas que de formalités notariales...

Par l’intermédiaire de Paul, l’auteur nous promène agréablement dans les environs de Miami et au Pays Basque. A Toulouse aussi, bien sûr, dans les secrets de la maison familiale et au volant d’une antique Triumph décapotable.

Le fil de l’histoire est entremêlé de digressions étonnantes. Le tranchage du cerveau de Staline lors de son autopsie ; la mort du dernier quagga, une sous-espèce de zèbre éteinte à la fin du XIXème siècle ; les aventures et mésaventures de Georges Labit, un grand voyageur et collectionneur toulousain... Des anecdotes distrayantes, mais toutes morbides. Pas aussi sinistres toutefois que le grincement des mandibules des vers xylophages rongeant le contenu des cerveaux malades...

Une pensée enfin pour une grande et belle Norvégienne, beaucoup plus âgée, solide comme un homme, fine comme une femme. Quand on cherche à la fois un père et une mère !...

Un roman superbement construit et remarquablement écrit que j'ai pris beaucoup de plaisir à lire.

  • GLOBALEMENT SIMPLE     oooo   J’AI AIME BEAUCOUP
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